Que la lumière soit ! et que croyez-vous qu'il arriva
La lumière fut ! Il est probablement incroyable que celà fasse
d'abord entrer dans l'Ecriture. Celà, c'est ce que j'appellerai
un symptome-type du réel. Car c'est bien de la lumière dans son
réel que s'est fait le frayage de la science, pas seulement
certes, mais entre autres. Vous savez aussi que la lumière,
la notion de sa vitesse précisément, est seule à nous donner
du réel un absolu mesurable, et c'est du même coup que s'en
démontre la relativité.
Quel coup de pot pour les croyants, que cet incroyable.
Pourtant, celà ne suscite pas forcément chez eux, on le sait,
un goût particulier des lumières, au sens d'Aufklärung. Ne vous
laissez pas trop impressionner par ce coup de pot. Pour vous
en remettre, constatez seulement ce dont il s'éclaire après
coup, une totale méconnaissance de la différence radicale du
dit luminaire du soleil au regard de ladite lumière. Ce qui
m'embête le plus, c'est que l'accent mis sur la parole créative
va dans le sens, non seulement, attribuer l'importance de la lumière
à la parole est une gafeure, ça ne va pas du tout dans mon sens.
Ce que l'inconscient démontre, c'est tout à fait
autre chose, à savoir que la parole est obscurantiste. J'impute
assez de méfaits à la parole pour lui rendre ici grâce de cet
obscurantisme, c'est son bienfait le plus évident. J'ai déjà poin-
té, dans mon premier temps de mon enseignement, la fonction du
frayage dans le symbolique, de ces lucioles, les étoiles. Elles
ne donnent pas beaucoup de lumière, c'est pourtant d'elles
que les hommes se sont éclairés, ce qui leur à permis de percer
le bonheur qu'ils éprouvent dans la nuit transparente.
L'obscurantisme propre à la parole se redouble de
la croyance dans la révélation qui impute à Dieu le " Que la
lumière soit " . Quand il se triple de philantropie et se
quadruple de progressisme, c'est la nuit noire. Quand les étoiles
s'éteignent, ça donne ça.
" Le désir des hommes est de se secourir les uns les
autres pour mieux être ", ça , je l'ai reçu
par la poste. J'avais
demandé que l'on m'écrive, eh bien, c'est bien fait pour moi . Il
faut dire qu'à la personne qui m'écrit ça, je n'avais rien
demandé
puisqu'elle ne vient pas à mon séminaire depuis
longtemps. C'est Françoise Dolto. C'est une petite lettre
pour dissiper le malentendu. Elle m'aime bien tellement qu'elle
ne peut supporter que l'Ecole soit dissoute, et pourquoi,
je vous le donne en mille . . . parce que l'Ecole, c'est moi !
C'est son axiome, alors, forcément, dissoudre l'Ecole serait
m'annuler, moi, et c'est ce qu'elle ne veut pas .
Il y a une paille, c'est que c'est moi qui dissous
l'Ecole. Ca ne l'arrête pas, et d'ailleurs, rien ne l'arrête,
elle s'imagine que je m'autodétruis, c'est pourquoi, conformé-
ment à son principe philantropique, elle vient à mon secours .
Vous voyez comment celà se tient, c'est logique , celà se voit .
Si c'était vrai, ça ferait de moi un type du genre
de Socrate . Socrate l'a désirée, sa mort, et obtenue de la main
de ceux sur qui il avait
répandu ses bienfaits. Ca ne lui a
pas mal réussi puisque par sa mort, il est devenu exemplaire .
Heureusement , je n'ai jamais dit, l'Ecole
Freudienne, c'est moi , j'aurai aussi bien pu dire que
Madame Dolto, c'est moi. Il y en a, parait-il qui le croient.
Et bien, c'est une erreur, je ne m'identifie pas du tout à Fran-
çoise Dolto, et pas davantage à l'Ecole Freudienne. Ce qui me
justifie de m'atteler dare dare à construire la Cause, la
Cause Freudienne . Ce qui en existe déjà suffit déjà à me
désidentifier de l'Ecole .
Je n'ai jamais eu d'autre visée, quant à mon
enseignement, que de le maintenir à son niveau. Je fais maintenant
ce qu'il faut pour préserver ce qu'il est capable de donner à
ceux qui se mettent dans mon sillage .
Mais déjà mon acte démontre que le réel en
jeu dans l'expérience n'est pas limité de principe à la seule
subsistance de la Société Psychanalytique. La finesse de mon
procédé tient à ceci que non seulement je n'exclus personne ,
mais encore j'accueille le tout venant .
Ai-je à déplorer que mon signifiant s'avère
apte à véhiculer n'importe quelle blague ? J'en suis comblé,
bien au contraire, puisque je ne dis pas autre chose. Mais la
plaisanterie est d'autant meilleure qu'elle est plus courte, ce qui
m'a inspiré d'abréger ce qui, s'agrégeant de malentendu
stagnait en impasse, voire se prétrifiait comme fraude.
Outre que je n'en ai pas le goût, je n'ai pas
besoin d'anathématiser ceux qui crient qu'ils m'aiment l'injure à la bouche .
Pour la bonne raison, que la fraude comme telle est source
d'angoisse sinon toujours ni chez ses agents ni ses victimes
mais chez ses descendants.
L'expérience psychanalytique donne une place éminente
à la fonction de la tromperie de se supporter du Sujet supposé
savoir, ce qui explique que si la tromperie vire à la fraude,
on n'en renvient pas.
J'ai tissé dans le cours de ce que j'ai dit mes réponses
à plusieurs de ceux qui m'ont écrit et qui s'y reconnaitront. Il
y a encore quelqu'un qui me demande si je ne m'imagirerais
pas, par hasard, être infaillible . Ce que je réponds, c'est que je
ne suis pas de ceux qui reculent devant le sujet de leur cer-
titude. C'est ce qui m'a permis de rompre avec ce qui s'était
gelé de la pratique de Freud dans la tradition dont il est clair
qu'elle tamponnait toute la transmission. Là, j'ai inventé. Ce qui
vous à ouvert un accès à Freud que je ne veux pas voir se
refermer. Je ne ferai pas la fine bouche à me reconnaitre comme
infaillible, mais comme tout le monde, soit au niveau de la
vérité qui parle et non du savoir. Je ne me prends pas pour le
sujet supposé savoir . Il en est pour qui il faut bien que je le
rappelle que c'est moi qui ai inventé ça, et précisément pour que
le psychanalyste dont c'est le naturel, cesse de se croire
je veux dire identique à lui. Le sujet supposé savoir, n'est
pas tout le monde ni personne, il n'est pas tout sujet mais pas
non plus un sujet nommable, il est quelque sujet. C'est le visiteur
du soir ou mieux il est de la nature du signe tracé d'une main
d'ange sur la porte, plus assuré d'exister de n'être pas onto-
logique et à venir d'on ne sait - z - où .